Le Balagan

Une newsletter pour partager avec vous mes questionnements sur la famille, le couple, le travail et le beau mélange de tout ça qui crée un joyeux balagan.

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Par Candice Satara
25 mai · 1 mn à lire
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Écrire l'indicible

La mort arrive quand on s'y attend le moins

Je ne sais pas si cette newsletter va pouvoir être finalisée car au moment où je vous écris, ce vendredi 17 mai, il est 7h50 et je suis dans le train où il n’y a pas beaucoup de réseau. Je vais enterrer ma soeur. Désolée aux nouveaux arrivants et arrivantes qui s’attendaient à lire une chronique drôle et grinçante d’une mère débordée par ses quatre gosses. Je suis ça normalement, mais cette semaine c’est différent.

Samedi 11 mai, ma soeur est morte. Elle avait 57 ans, elle avait la vie devant elle et des milliers de projets, elle avait trouvé l’amour et vivait heureuse avec lui dans un petit village de Charente. Ma soeur a fait une crise cardiaque, et personne n’a pu la réanimer, comme ça, comme mon père il y a 15 ans. On cherche toujours des signes, on cherche à comprendre à expliquer, mais on trouve pas les réponses car il y en a pas. C’était une belle journée, ce vendredi 10 mai, rien ne laisser présager cette catastrophe. La mort est sournoise, vicieuse, elle vous attrape sans prévenir quand elle l’a décidé.

Je ne réalise toujours pas que c’est fini.

Alors je vais vous parler un peu d’elle. De nous quatre, Valérie était assurément la plus gentille et la plus douce. Elle a toujours vécu loin de nous, loin du tumulte parisien, on s’appelait pas énormément mais c’était pas nécessaire. Elle me lisait, commentait mes newsletters. Valerie avait toujours un mot gentil, un mot réconfortant pour nous. Elle débarquait les bras chargés de cadeaux. Je n’étais pas Candice, j’étais : “Ma soeur”, “Ecoute ma soeur je gagne bien ma vie maintenant, laisse moi gâter mes enfants”. J’étais moins proche d’elle que mes autres soeurs plus âgés. Je ne prenais pas le temps de prendre des nouvelles assez souvent, car je ne prends le temps de rien. Valérie était une créatrice de bijoux talentueuse, dans son atelier, à Mornac, elle vendait ses créations et se déplaçait dans toute la France. Elle avait trouvé son équilibre après une vie pas toujours simple. Elle avait Nicolas, Nicolas mon neveu de 30 ans. Nicolas, effondrée, orphelin de sa mère. Je crois qu’on ne peut pas se remettre de perdre sa mère.

Depuis samedi dernier, je suis comme anesthésiée, je suis retournée au boulot sans rien dire et je travaille machinalement, efficacement, comme à mon habitude. Ça me fait du bien, ça m’empêche de penser à l’impensable. Ça m’arrive même de rire. Dans la rue, je regarde les passants et je voudrais parfois les arrêter et leur dire : “Vous pouvez arrêter de sourire s’il vous plait, ma soeur est morte". J’évalue les âges des gens, j’envie les vieux et je les déteste à la fois. J’ai l’impression que mes jours sont comptés, que mon coeur aussi un jour va s’arrêter brutalement. Je me dis que c’est le début d’une année noire, que les malheurs vont s’enchaîner… J’ai eu 41 ans hier. Je suis avec mes fils dans le train, et je vais retrouver ma famille et dire au-revoir à ma soeur. Sur le quai de la gare Montparnasse, on se regarde tous les 4 en se disant qu’on aurait préféré partir en week-end de Pentecôte. C’est surréaliste.

Je vous souhaite un bon week-end. Prenez soin de ceux que vous aimez. 🖤🖤🖤